La réforme du droit des sûretés [PART – 1] : le sort des sûretés personnelles et les nouvelles règles du cautionnement
Publié le :
29/10/2021
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Le droit des sûretés vient d’être réformé par voie d’ordonnance du 15 septembre 2021 (n°2021-1192), l’occasion pour notre Étude d’exposer à travers nos publications mensuelles, les principaux changements introduits par la réforme, avec un premier volet consacré aux sûretés personnelles et plus particulièrement le cautionnement.
Convention qui porte sur une obligation présente ou future, le cadre juridique du cautionnement était jusqu’à aujourd’hui constitué de dispositions issues du Code civil, de celui de la consommation et complété par des règles jurisprudentielles. La réforme prévoit une codification unifiée.
Rappels liminaires sur la notion de sûreté
La définition donnée aux sûretés et celle de techniques qui, par la mise à disposition d’un patrimoine, d’un bien ou d’un droit, permettent d’assurer un créancier du règlement de son dû, dans le cas où le débiteur se retrouverait dans l’impossibilité de rembourser ou payer sa créance, notamment du fait d’une insolvabilité.Le droit positif propose une classification des sûretés, selon leurs sources : qu’elles soient légales, judiciaires ou conventionnelles, dans le cadre de l’étude cette distinction est opérée selon l’origine des sûretés : réelles ou personnelles.
Les sûretés réelles sont celles où le débiteur confie un bien, mobilier ou immobilier, comme garantie de paiement en cas de défaillance de sa part. Dans cette hypothèse, les créanciers sont payés sur le produit issu de la vente des biens.
Les sûretés personnelles quant à elles sont prises en la forme d’un engagement d’un tiers envers le créancier d’un débiteur. En cas de défaillance du débiteur, le tiers est appelé en paiement de sa créance.
La réforme du cautionnement
Le cautionnement est considérablement revu par la réforme du 15 septembre 2021, par une nouvelle codification plus claire, qui pose d’ailleurs sa définition au premier alinéa de l’article 2288 du Code civil :« Le cautionnement est le contrat par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci ».
Contrairement à la définition qui lui était donnée jusqu’à présent (Celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même), la réforme fait apparaître la notion d’obligation de payer la dette.
La pratique du sous-cautionnement est également codifiée comme étant un contrat ou un tiers s’engage envers la caution à lui verser ce que peut lui devoir un débiteur à raison du cautionnement pour lequel ce dernier s’est porté.
Sur le formalisme du cautionnement en lui-même, jusqu’alors étaient imposées une mention manuscrite et une signature, seulement l’égard des cautions personnes physiques qui s’engageaient au profit de créanciers professionnels, et cette forme de cautionnement était prérédigée, non pas dans le Code civil, mais par le Code de la consommation.
Désormais, l’engagement de la caution concerne toutes les personnes physiques sans distinction de la nature du créancier, et l’engagement doit comporter, sous peine de nullité, la mention comme quoi elles s’engagent à payer au créancier la dette du débiteur en exprimant celle-ci en chiffres et en lettres concernant son montant et ses accessoires. La nouvelle rédaction précise qu’en cas de différence entre la mention en chiffre et en lettre, c’est cette dernière qui prime, venant par avance mettre fin à d’éventuels litiges. L’engagement de la caution est donc limité au montant porté sur l’acte et à l’inverse, la mention concernant la durée de l’engagement disparaît de la nouvelle formulation.
L’absence de dispositions propres à ce que la mention soit obligatoirement manuscrite laisse également supposer la possibilité pour l’avenir de conclure cet engagement par voie électronique, formalisme actuellement possible concernant les actes de cautionnement conclus sous la forme authentique.
La réforme du droit des sûretés consacre le devoir de mise en garde pour les créanciers professionnels, issue d’une création prétorienne. Ces derniers sont désormais tenus de mettre en garde les personnes physiques qui se portent caution lorsque l’engagement du débiteur est inadapté à ses capacités financières.
C’est par exemple la souscription d’un prêt si conséquent que les revenus et biens ne peuvent permettre de faire face au paiement.
Si le créancier manque à ce devoir, il n’est plus simplement tenu au paiement de dommages et intérêts, mais perd son droit de poursuite sur la caution, c’est-à-dire la possibilité pour ce dernier de mettre en œuvre une procédure lui permettant de recouvrer la dette, notamment d’obtenir une mesure d’exécution forcée.
Concernant justement cette obligation, une exigence légale de proportionnalité sera désormais consacrée dans le Code civil, règle jusqu’alors encadrée par plusieurs dispositions du Code de la consommation.
Mais alors qu’en vertu des textes actuels le créancier professionnel, faute de proportion entre l’engagement et le patrimoine, ne peut tout bonnement pas se prévaloir du contrat de cautionnement, avec la rédaction actuelle l’engagement est réduit au montant à hauteur duquel la personne pouvait s’engager à la date de la conclusion de l’acte de cautionnement. Les ressources de la caution au jour de la conclusion de l’acte d’engagement sont donc réellement prises en considération.
La caution pourra quant à elle opposer toutes les exceptions appartenant au débiteur principal, qu’elles soient personnelles ou inhérentes à la dette de ce dernier alors que la rédaction antérieure du Code civil prévoyait une exception pour la caution d’opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.
C’est par exemple un débiteur victime d’un dol entraînant des répercussions sur son engagement financier (achat immobilier pris sur une évaluation trompeuse du bien), la personne physique s’étant portée caution peut évoquer le bénéfice du dol pour s’opposer à la mise en œuvre du cautionnement.
Cette règle trouve toute logique étant donné que l’objet de l’engagement de la caution pris en la dette du débiteur, toute circonstance l’affectant doit pouvoir être opposée par la caution.
Enfin, sur l’extinction du cautionnement en lui-même, et par application des règles propres à la résiliation des engagements à durée indéterminée, la nouvelle rédaction de l’article 2315 du Code civil consacre l’extinction du cautionnement de dettes futures : « Lorsqu’un cautionnement de dettes futures est à durée indéterminée, la caution peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable ».
Étant précisé que ces nouvelles règles ne seront applicables que pour les cautionnements pris à partir du 1er janvier 2022.
Me Marine LE GAC
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