Le chantage
S’agissant d’une notion bien connue du grand public, il est facile d’oublier que le chantage constitue un délit exposant son auteur à de lourdes sanctions, que les menaces soient ou non mises à exécution.
Une variante de l’extorsion
Le chantage est certes une infraction sanctionnée à part entière, mais elle fait partie de l’ensemble plus large qu’est l’extorsion. Les deux infractions visent en effet à obtenir le même résultat, à savoir obtenir indûment une signature, un engagement ou une renonciation, la révélation d’un secret, la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque. Elles diffèrent cependant dans les moyens utilisés pour parvenir à ce résultat.
Moyens et conditions
L’extorsion consiste à obtenir le résultat attendu en utilisant la violence, la menace de violence ou la contrainte. Le chantage est une variante de l’extorsion relativement la contrainte. L’infraction de chantage ne peut être retenue que lorsque l’auteur utilise la menace de révéler ou d’imputer des faits de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération (art. 312-10 du Code pénal).
Il y a donc deux moments qui structurent le chantage :
- une période de menace, qui doit nécessairement être antérieure à la révélation ;
- une période postérieure à la remise indue, que la menace ait finalement été mise à exécution ou non.
La forme du chantage importe peu, il peut s’agir de menaces écrites ou verbales. En principe, le chantage ne sera caractérisé que s’il porte sur la révélation de faits inconnus. La jurisprudence a cependant déjà retenu que des faits tombés dans l’oubli et ravivés par une révélation, ou des faits faisant simplement l’objet de rumeurs et qui seraient confirmés par une révélation, peuvent également entrer dans le périmètre du chantage.
Ce qui est indûment obtenu par l’auteur du chantage peut avoir une valeur patrimoniale ou non, il peut notamment s’agir de la révélation d’informations strictement privées, qui n’ont aucune valeur marchande. La répression de ce comportement vise plus à protéger la liberté de décision de l’individu que son patrimoine. Démontrer le chantage peut ainsi être fait en prouvant qu’un acte, même non-préjudiciable à la victime, n’aurait pas été conclu s’il n’avait pas eu lieu.
Enfin, ultime condition, les faits qui seraient révélés doivent porter atteinte à l’honneur ou à la considération.
Sanctions du chantage et exceptions
Le chantage est une version allégée de l’extorsion, les faits reprochés à l’auteur sont de moindre gravité par rapport à la violence ou la menace de violence. Cela explique que le chantage soit sanctionné moins sévèrement. Le maître chanteur s’expose à un emprisonnement de 5 ans et 75 000 euros d’amende. Si la menace est mise à exécution, la punition de ce délit est aggravée à 7 ans de prison et 100 000 euros d’amende (art. 312-11 du Code pénal.)
Reste le cas particulier de la menace de recourir aux voies de droit. De manière générale, les juridictions sont réticentes à prononcer une condamnation à l’encontre d’une personne qui menace simplement d’une action en justice, s’agissant d’un droit reconnu à tous. Comme pour chaque droit cependant, la jurisprudence veille à ce que l’exercice d’une prérogative ne dégénère pas en abus de droit.
Me Déborah MARTOS
Historique
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