Pourquoi l'attribution automatique du nom du père suivi de celui de la mère est discriminatoire selon la CEDH ?
Publié le :
02/12/2021
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En France, depuis la loi du 4 mars 2002 relative au nom de famille (n°2002-304) les parents du futur enfant peuvent lui attribuer au choix l’un de leurs noms, sinon les deux, à condition d’être d’accord.
À défaut d’entente, une déclaration de désaccord est transmise par l’un des parents à l’officier d’état civil au plus tard le jour de la déclaration de naissance, qui attribuera à l’enfant un double nom, composé avec ceux des parents, et accolés par ordre alphabétique.
À défaut de choix par les parents, l'enfant prend le nom de son père si ses parents sont mariés, sinon à défaut de mariage entre eux : celui du parent qui l’a reconnu en premier ou du nom du père s’ils l’ont reconnu simultanément.
Ces règles d’attribution du nom de famille de l’enfant diffèrent d’un état à l’autre, à l’instar d’une récente décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), où un motif discriminatoire était soulevé.
Dans les faits, une résidente espagnole s’est séparée du père de son enfant pendant sa grossesse et à la naissance de l’enfant, la petite-fille est inscrite au registre de l’état civil avec les deux noms de famille de la mère.
La mère rétablit les liens entre l’enfant et son père lui autorisant certaines visites, mais cesse tout contact en raison, selon elle, d’une situation de harcèlement psychologique.
Le père entame alors une procédure en réclamation de paternité non matrimoniale en réponse de laquelle la mère sollicite la privation du père, de son autorité parentale.
En première comme en seconde instance, le père est reconnu comme parent biologique par application de la loi en vigueur. L’enfant se voit attribuer le nom du père, suivi de celui de la mère, bien que la Cour d’appel ait reconnu l’entrée en vigueur d’une loi du 5 novembre 1999, créée afin d’éliminer la discrimination homme-femme à ce sujet, laquelle précise cependant que le consentement explicite des deux parents est nécessaire.
Le litige est porté devant la CEDH ou la mère soulève la discrimination de la règle qui impose à l’enfant, par suprématie injustifiée et arbitraire, le nom de famille du père sur celui de la mère.
Le verdict de la Cour est net puisqu’elle juge la décision du juge espagnol discriminatoire et que l’impossibilité de déroger à la règle d’attribution automatique du nom du père avant celui de la mère « est excessivement rigide et discriminatoire envers les femmes ».
Cette différence de traitement entre la mère et le père constitue donc une violation de la Convention européenne des droits de l’Homme, notamment au vu des éléments de l’espèce : l’enfant n’avait pas été reconnu immédiatement par son père et avait porté pendant plus d’un an les noms de famille de sa mère.
L’Espagne a donc été condamnée à indemniser le préjudice moral de la mère à hauteur de 10 000 euros.
ATIAS & ROUSSEAU Avocats
Référence : CEDH, affaire Léon Madrid c. Espagne, 26 octobre 2021, 30306/13
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