Évaluation des créances entre époux en présence d’une pluralité de dépenses sur un bien personnel
Publié le :
08/09/2022
08
septembre
sept.
09
2022
L’effet principal d’un divorce est qu’il provoque la liquidation du régime matrimonial des époux, opération au cours de laquelle est déterminée la masse partageable, ainsi que les éventuelles récompenses nées entre époux durant le mariage.
Le régime de la séparation de biens échappe en principe à cette notion de récompenses, en ce que son fonctionnement repose sur l’absence de biens communs entre époux, ainsi que la libre disposition de leurs biens personnels. Pour autant, et à l’instar d’une décision rendue le 22 juin dernier par la Cour de cassation, la liquidation de ce régime matrimonial séparatiste peut donner lieu au partage des biens indivis et au règlement de créances entre époux, qui génèrent un contentieux régulier.
Dans cette affaire, deux époux séparés en biens divorcent, et le jugement ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Cependant, des difficultés interviennent lors des opérations de comptes, liquidation et partage, puisque l’ex-épouse justifie du fait d’avoir contribué au financement de l’acquisition et l’amélioration d’un bien personnel de son mari, dont les échéances de prêts avaient été remboursées par le biais du compte joint du couple.
Précision importante : le premier prêt avait servi à financer l’acquisition du bien, tandis que le second avait été employé à la réalisation de travaux d’amélioration.
La Cour d’appel, pour fixer une seule et même créance due par l’ex-épouse, retient que le coût des travaux d’amélioration dont elle a partiellement participé au financement, doit être intégré dans la valeur actuelle de la maison permettant de fixer le montant du profit subsistant, et écarte ainsi toute créance relative au financement des travaux. La seule et même créance reconnue à l’épouse est alors fixée à 51 644,46 euros.
Cette méthode de calcul est sanctionnée par la Cour de cassation.
En effet, la Haute juridiction rappelle au visa des articles 1469 alinéa 3, 1479 alinéa 2 et 1543 du Code civil, que « lorsque les fonds d’un époux séparé de biens ont servi à acquérir un bien personnel de l’autre, sa créance contre ce dernier ne peut être moindre que le profit subsistant ni moindre que le montant nominal de la dépense faite, d’autre part, que le profit subsistant, qui représente l’avantage réellement procuré au fonds emprunteur, se détermine d’après la proportion dans laquelle les fonds empruntés au patrimoine de l’époux appauvri ont contribué au financement de l’acquisition du bien personnel de son conjoint ».
De ce postulat, en présence de pluralité d’emprunt destiné à des financements différents, la Cour de cassation précise que la créance due au titre des dépenses d’acquisition doit être évaluée distinctement par rapport à celle concernant les dépenses d’amélioration et vice versa.
Dans un objectif de précision qui sera utile aux professionnels du droit, la première chambre civile détaille la méthode de calcul pour chaque créance :
- Pour les dépenses d'acquisition du bien personnel, le calcul du profit subsistant s'effectue en établissant la proportion de la contribution de l’époux au paiement du coût global de l'acquisition, en y appliquant la valeur du bien au jour de la liquidation de la créance selon son état lors de l'acquisition ;
- Pour les dépenses d’amélioration du bien personnel, le calcul du profit subsistant s'effectue en établissant la proportion de la contribution de l’époux au paiement des travaux, en y appliquant la différence existant entre la valeur au jour de la liquidation du bien amélioré et celle qui aurait été la sienne sans les travaux.
LEXGROUP Notaires
Référence de l’arrêt : Cass. civ 1ère 22 juin 2022 n°20-20.202
Définitions :
- Séparation de biens : régime matrimonial où chaque époux conserve la jouissance, l’administration et la libre disposition de ses biens personnels.
- Liquidation du régime matrimonial : opération par laquelle, à la suite d’un divorce, d’une séparation de bien ou d’un changement de régime matrimonial, les comptes sont établis entre les époux préalablement au partage afin de définir si les époux sont créanciers ou débiteur l’un envers l’autre, et de combien.
- Récompense entre époux : indemnité due par la communauté à l’un des époux, lorsqu’ils sont mariés sous le régime de la communauté de biens, ou par l’un des époux à la communauté, qui vise à rétablir d’éventuels déséquilibres causés par des mouvements de valeur.
- Créance entre époux : Mouvement de valeurs entre les masses de biens personnels des époux, qui fait naître une dette chez l’un supportée par l’autre époux.
Historique
-
Évaluation des créances entre époux en présence d’une pluralité de dépenses sur un bien personnel
Publié le : 08/09/2022 08 septembre sept. 09 2022Articles / CivilArticlesL’effet principal d’un divorce est qu’il provoque la liquidation du régime matrimonial des époux, opération au cours de laquelle est déterminée l...
-
EPISODE 45 : Drague lourde et licenciement : le fait que la personne visée ne soit pas salariée de l’entreprise n’empêche pas la sanction
Publié le : 07/09/2022 07 septembre sept. 09 2022PODCASTSLe fait que les propos à connotation sexuelle aient été tenus à l'égard d'une salariée tierce à l'entreprise, n'empêche pas le licenciement pour faute grave du salarié qui les a tenu, tant qu'ils sont en lien avec la sphère professionnelle.
Lien du texte
-
CONSOMMATION - Connaissance du vice résultant de l'inobservation du formalisme des contrats conclus hors établissement
Publié le : 06/09/2022 06 septembre sept. 09 2022Veille JuridiqueCass. civ 1ère du 31 août 2022 n°21-12.968
Selon la Cour de cassation, la reproduction lisible, dans un contrat conclu hors établissement, des dispositions du Code de la consommation qui prescrive le formalisme applicable à ce type de contrat, permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions.