PÉNAL – Dispositif antirapprochement : la mesure n’est pas justifiée à défaut de lien entre l’infraction de destruction de bien d’autrui en raison du lien conjugal
Publié le :
01/06/2023
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Cass. crim du 11 mai 2023, n°22-84.480
Dans l’affaire portée devant la chambre criminelle de la Cour de cassation le 11 mai dernier, un homme avait été condamné à dix-huit mois d'emprisonnement dont douze mois avec sursis probatoire, en répression de faits de destruction du bien d'autrui par moyen dangereux, soit l'incendie de la maison dont il était propriétaire avec son épouse. Par ailleurs, au moment des faits une procédure de divorce était en cours, et de faits de violences envers personnes dépositaires de l'autorité publique.
Postérieurement au premier jugement, le juge de l'application des peines avait ajouté aux obligations du sursis probatoire, les interdictions d'entrer en contact avec l’épouse et de paraître à son domicile, et quelques jours plus tard, le procureur de la République avait requis du juge de l'application des peines qu'il ajoute l'obligation de porter un dispositif électronique antirapprochement, mesure alors refusée par ordonnance.
En appel, cette décision est confirmée, la juridiction considérant qu’il n’y avait pas lieu à soumettre l'interdiction de se rapprocher de l’épouse à un dispositif électronique mobile antirapprochement, au motif que si ce dispositif peut être prononcé pour des infractions autres que des violences, le texte exige que la circonstance aggravante de la commission de l'infraction par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte de solidarité ait été retenue par la juridiction de jugement.
Devant la Cour de cassation, le Procureur de la République argue du fait que cette décision contraire à l’esprit de la loi qui est permettre de limiter le risque de violences futures commises par le conjoint ou ancien conjoint sur la victime. D’autre part, en matière de sursis probatoire, selon lui l'article 132-45, 18° bis relatif au port du bracelet antirapprochement, s'il vise les victimes de violences, n'en limite pas le champ d'application aux seules infractions de violences, mais exige seulement que les personnes dont il fait interdiction de se rapprocher aient été reconnues victimes de violences au sein du couple, soit par la décision prononçant le sursis probatoire ou celle modifiant ses obligations particulières, soit, comme dans le cas d'espèce, par une décision de culpabilité ou de condamnation antérieures. Enfin s'agissant du délit de destruction de bien d'autrui par moyen dangereux, réprimé par l'article 322-6 du code pénal et faisant encourir dix ans d'emprisonnement, soit le maximum en matière délictuelle, il serait impossible de prévoir la circonstance aggravante de sa répression, alors que cette infraction, lorsqu'elle est commise contre le conjoint ou ancien conjoint, peut révéler un risque grave de violences justifiant d'une mesure de protection particulière de la victime.
Ces arguments sont balayés par la Cour de cassation, qui bien qu’en reconnaissant que c’est à tort que la Cour d’appel a ajouté à l'article 132-45-1 du Code pénal une condition qu'il ne prévoit pas, puisque la mesure peut être prescrite sans qu'il soit nécessaire que la qualité de la victime soit visée comme circonstance aggravante par la décision de condamnation, rejette le pourvoi au motif que « l'ordonnance n'encourt pas la censure, dès lors que, par des motifs souverains et dénués d'insuffisance, il a été démontré que, d'une part, il n'est pas établi que l'infraction ait été commise en raison du lien conjugal, d'autre part, les interdictions prononcées par ailleurs suffisent à éviter tout risque de réitération ».
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