Congés payés : Quand la Cour de cassation rebat les cartes…
En matière de congés payés, le droit du travail français subordonne leur acquisition à l’exécution d’un travail effectif par le salarié.
Jusqu’à présent, le Code du travail considérait comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé, une liste d’évènements attachés à la vie personnelle ou professionnelle : maternité, paternité, adoption, et, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, les périodes de suspension du contrat pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
À contrario, étaient exclues les périodes de suspension du contrat au titre des maladies non-professionnelles.
En d’autres termes, un salarié absent pour cause de maladie n’acquerrait plus de jours de congés pour la période de son absence.
Forcée d’adopter un positionnement conforme à la législation européenne, la Cour de cassation a, par trois arrêts publiés le 13 septembre 2023, revu sa copie et, ce faisant, écarté l’application de l’article L.3141-5 du Code du travail.
Sa position est claire : quelle que soit l’origine de l’arrêt de travail du salarié, cette suspension du contrat de travail entraîne nécessairement ouverture des droits à congés payés, de sorte qu’en matière de calcul, l’indemnité compensatrice de congé payé ne peut plus être limitée à un an.
Sa décision est fondée que la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, laquelle n’opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d’un congé de maladie, pendant la période de référence, et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période, dont elle en a déduit que s’agissant de travailleurs en congé maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État.
La Cour de cassation en conclut que les dispositions de l'article L.3141-3 du Code du travail, qui subordonnent le droit à congé payé à l'exécution d'un travail effectif, ne permettent pas une interprétation conforme au droit de l'Union européenne.
En conséquence, la Cour de cassation préconise d’écarter partiellement les dispositions de l’article L.3141-3 du Code du travail, qui subordonnent le droit à congé payé à l’exécution d’un travail effectif et de juger que le salarié peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période en application des dispositions des articles L.3141-3 et L.3141-9 du code du travail.
En complément, la notice jointe à cette jurisprudence précise que cette position doit être adoptée à l’égard de l’intégralité des droits à congés payés, qu’il s’agisse des droits légaux c’est-à-dire du nombre de jours de congés payés légaux garantis par la loi, ou des congés payés supplémentaires conventionnels.
Concernant le délai de prescription permettant d’éteindre toute action en réclamation de droits aux congés payés, la Haute juridiction précise que la perte de droit au congé annuel payé ne peut être prescrite, qu’à la condition que l’employeur justifie avoir mis le salarié en mesure d’exercer ce droit en temps utile. Cette information constitue dorénavant le point de départ de la prescription triennale en la matière.
EPILOGUE Avocats
Référence des arrêts : Cass. soc du 13 septembre 2023, n°22-17.340, n°22-17.341, n°22-17.342
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