PENAL - Le refus de communiquer le code de déverrouillage d’un téléphone portable peut constituer un délit
Publié le :
08/11/2022
08
novembre
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11
2022
Cass. Plénière 7 novembre 2022, n°21-83.146
La Cour de cassation a rendu hier un arrêt très attendu en matière de criminalité et d’accès aux données.
L’affaire concernait une personne poursuivie pour infraction à la législation sur les stupéfiants, laquelle avait refusé de communiquer aux enquêteurs les mots de passe de deux téléphones saisis au moment de son interpellation.
S’opposant à une communication de données de déverrouillage de moyens de télécommunication susceptibles d’avoir été utilisés pour les besoins de l’infraction, des poursuites pour refus de remettre la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie étaient également engagées, mais la relaxe fût prononcée par la Cour d’appel, avant que la décision soit censurée par la chambre criminelle Cour de cassation en 2020.
L’affaire, à nouveau portée devant une juridiction de second degré, fait une fois encore l’objet d’une relaxe, au motif que la clé de déverrouillage de l'écran d'accueil d'un smartphone n'est pas une convention secrète de déchiffrement, car elle n'intervient pas à l'occasion de l'émission d'un message et ne vise pas à rendre incompréhensibles ou compréhensibles des données, mais tend seulement à permettre d'accéder aux données et aux applications d'un téléphone, lesquelles peuvent être ou non cryptées.
Hier, la Cour de cassation, en formation plénière, a dû trancher à nouveau la question quant à savoir si le code permettant de déverrouiller l’écran d’accueil d’un téléphone s’apparente à une convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie, au sens de la loi pénale.
Oui, répond la formation solennelle !
D’une part en application de l’article 434-15-2 du Code pénal : « est punissable toute personne qui, ayant connaissance de la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie susceptible d'avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit, refuse de la remettre aux autorités judiciaires
ou de la mettre en œuvre, sur les réquisitions de ces autorités délivrées en application des titres II et III du livre Ier du code de procédure pénale ».
Et d’autre part, la Haute juridiction considère que, selon les termes de l’article 29 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique : « un moyen de cryptologie s'entend de tout matériel ou logiciel conçu ou modifié pour transformer des données, qu'il s'agisse d'informations ou de signaux, à l'aide de conventions secrètes ou pour réaliser l'opération inverse avec ou sans convention secrète. Les moyens de cryptologie ont principalement pour objet de garantir la sécurité du stockage ou de la transmission de données ».
Ainsi, par combinaison de ces deux dispositions, la Cour de cassation considère qu’ « une convention de déchiffrement s'entend de tout moyen logiciel ou de toute autre information permettant la mise au clair d'une donnée transformée par un moyen de cryptologie, que ce soit à l'occasion de son stockage ou de sa transmission », par conséquent : le code de déverrouillage d'un téléphone mobile peut constituer une clé de déchiffrement si ce téléphone est équipé d'un moyen de cryptologie, et il incombe alors au juge de rechercher si le téléphone en cause « est équipé d'un tel moyen et si son code de déverrouillage permet de mettre au clair tout ou partie des données cryptées qu'il contient ou auxquelles il donne accès ».
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