Le devoir de mise en garde de la banque - Crédit photo : © @freepik
Crédit photo : © @freepik

Le devoir de mise en garde de la banque

Publié le : 25/10/2023 25 octobre oct. 10 2023

Création issue de la jurisprudence, le devoir de mise en garde du banquier impose à ce professionnel, d’informer son client qui contracte un prêt auprès de son établissement, des risques de surendettement, eu égard sa situation financière.
À défaut de respecter cette obligation, et si l’emprunteur n’est plus en mesure de faire face au remboursement du crédit, le banquier peut être poursuivi et voir sa responsabilité engagée sur la base d’une faute : celle du manquement à son devoir de mise en garde.

 

Qui est en mesure d’engager la responsabilité du banquier ?


Seuls les emprunteurs et les cautions non avertis sont susceptibles d’engager la responsabilité d’une banque, sur le fondement du manquement au devoir de mise en garde.

L’emprunteur non averti est considéré par la jurisprudence, comme le consommateur qui n’est pas en mesure d’apprécier le risque d’endettement excessif lié à la souscription d’un prêt, à l’instar de ceux qui ne disposent d’aucune expérience dans le secteur de la finance (Cass.  27/032019, n°18-10.592).

Du côté de la caution, le même raisonnement est retenu et est consacré à l’article 2299 du Code civil puisque le professionnel est tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l'engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier. Le caractère profane ou non averti de la caution, s’apprécie en fonction des compétences dont elle peut disposer pour apprécier les risques liés au cautionnement. À titre d’exemple, peut être considérée comme avertie, la caution qui exerce ou a exercé des fonctions de direction, ou une profession qui lui aurait permis de bénéficier de conseils spécialisés en la matière, comme les professionnels du droit.

 

Comment s’apprécie le manquement au devoir de mise en garde de la banque ?


Face à un emprunteur profane ou à l’engagement d’un garant non averti, lorsque la contraction du prêt n’était pas adaptée à ses capacités financières, ou lorsque l’engagement du débiteur principal apparaissait comme inadapté aux capacités financières de ce dernier, mais que la souscription du crédit a quand même eu lieu, la responsabilité de la banque ne pourra être engagée que s’il est démontré qu’elle a manqué à son devoir de mise en garde sur ce point.

La charge de la preuve pèse ici sur la banque, qui doit être en mesure de justifier « avoir satisfait à cette obligation à raison des capacités financières de l'emprunteur et des risques nés de l'octroi du prêt » (Cass. chambre mixte, 29/06/2007 n°05-21.104).

Afin de veiller au respect du devoir de mise en garde, le banquier peut s’appuyer sur les dispositions du Code de la consommation, en procédant, avant la conclusion du contrat de prêt, à une évaluation rigoureuse de la solvabilité de l'emprunteur fondée sur des facteurs pertinents permettant d'apprécier la capacité de l'emprunteur à remplir ses obligations définies par le contrat de crédit.
À ce titre, le prêteur s'appuie sur des informations nécessaires, suffisantes et proportionnées relatives aux revenus et dépenses de l'emprunteur ainsi que sur d'autres critères économiques et financiers, recueillis auprès de sources internes ou externes pertinentes, y compris de l'emprunteur.

La signature d’un document écrit attestant de la prise en compte de ces éléments, par les parties, est par conséquent fiable pour démontrer que la banque a satisfait à son obligation.

 

Quelles sont les conséquences du manquement au devoir de mise en garde ?


Si la banque est tenue de fournir la preuve du respect de son devoir de mise en garde, l’emprunteur doit quant à lui justifier que le prêt accordé lui a fait courir des risques relatifs à sa situation patrimoniale et financière.
L’emprunteur qui justifie de l’existence d’un risque d’endettement excessif au jour de la conclusion du prêt dispose alors de cinq ans à compter du premier incident de paiement pour engager une action, sinon former une demande reconventionnelle contre la banque qui l’a assigné en paiement, afin d’obtenir l’indemnisation de son préjudice.

Concernant la caution, le non-respect de la banque du devoir de mise en garde a pour effet une déchéance de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci.


ATIAS ROUSSEAU 

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