Compétence du juge administratif en matière de décision de conclure un contrat sur le domaine privé
Publié le :
31/07/2023
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Le Conseil d’État a récemment été saisi d’un litige portant sur la compétence du juge administratif en matière de gestion du domaine privé, où la règle veut normalement que sa compétence soit limitée aux actes de disposition portant sur le domaine privé, laissant le soin au juge judiciaire de se prononcer concernant les actes de gestion.
A titre liminaire, la convention de fortage permet au propriétaire d’une carrière, de concéder à un exploitant le droit de l’exploiter ou d’extraire des matériaux du sol, moyennant le versement d’une redevance. Ce contrat dont l’objet porte sur l’extraction de matériaux, ne prive pas le propriétaire de son droit de propriété du sol et du sous-sol.
Dans cette affaire, un contrat de fortage avait été signé entre une commune et une société, dont l’objet portait sur l'exploitation d'une carrière sur une parcelle communale, dépendance de son domaine privé.
Plus d’un an plus tard, la commune avait conclu un bail emphytéotique avec une société sur cette même parcelle, prorogé de 18 mois, en vue de la réalisation d'un parc photovoltaïque, par une délibération du conseil municipal assortie d'une mise à disposition du site autorisant la société à y installer les équipements nécessaires à la réalisation des études de faisabilité du projet.
Par un jugement du 4 novembre 2020, le Tribunal administratif de Marseille avait rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, la demande de la société avec laquelle la commune avait signé le contrat de fortage, laquelle réclamait l’annulation de la délibération approuvant la prorogation de la promesse de bail emphytéotique. Sur appel de cette société, la Cour administrative d'appel de Marseille avait finalement annulé ce jugement, engendrant le pourvoi en cassation de la société pour qui la promesse de bail emphytéotique était consentie.
Il appartenait par conséquent à la Haute juridiction administrative, de répondre à la question tenant à savoir si la juridiction administrative était compétente pour connaître de la demande formée par un tiers concernant l’annulation de la délibération d’un conseil municipal autorisant la conclusion d’une convention ayant pour objet la mise à disposition d’une dépendance du domaine privé communal.
Le Conseil d’État répond par l’affirmative et retient que « si la contestation par une personne privée de l'acte, délibération ou décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance relève de la compétence du juge judiciaire, la juridiction administrative est compétente pour connaître de la demande formée par un tiers tendant à l'annulation de la délibération d'un conseil municipal autorisant la conclusion d'une convention ayant pour objet la mise à disposition d'une dépendance du domaine privé communal et de la décision du maire de la signer ».
Les juges du Palais-Royal considèrent que c'est sans erreur de droit que la Cour administrative d'appel, après avoir relevé que la société appelante était titulaire d'un contrat de fortage conclu avec la commune sur une dépendance de son domaine privé, a jugé qu'elle avait néanmoins la qualité de tiers à la convention ultérieurement conclue entre la commune et la seconde société, portant sur cette même dépendance, et en a déduit que la contestation, par la société titulaire du contrat de fortage, de la délibération approuvant cette convention, qui avait pour objet la valorisation de cette emprise foncière, relevait de la compétence de la juridiction administrative.
Cette décision s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’État, qui par le passé a reconnu la compétence juridictionnelle du juge administratif, pour connaître des actes relatifs aux relations contractuelles portant sur la valorisation et la protection du domaine privé (CE 8ème – 3ème chambres réunies ; 07/03/2019, n°417629).
DEVARENNE Associés Grand Est
Référence de l’arrêt : Conseil d’État, 28 juin 2023, 3ème – 8ème chambre réunies, n°456291
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