La géolocalisation des salariés : autorisations et limites
Publié le :
17/03/2022
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Contrôler l’activité de leurs salariés est une finalité à laquelle de nombreux employeurs aspirent, notamment par l’usage de techniques de géolocalisation du personnel.
Bien qu’autorisé, ce procédé entre en confrontation avec le droit fondamental des salariés leur garantissant un droit au respect à leur vie privée, et requiert une grande vigilance lorsque l’entreprise souhaite y avoir recours.
La définition de la géolocalisation des salariés
La géolocalisation ne comporte pas en soit de définition juridique, mais la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), définit cette manœuvre comme issue d’une « Technologie permettant de déterminer la localisation d’un objet ou d’une personne avec une certaine précision. La technologie s’appuie généralement sur le système GPS ou sur les interfaces de communication d’un téléphone mobile ».À proprement parler, la géolocalisation d’un salarié porte non pas sur le salarié lui-même, mais sur les outils mis à sa disposition, comme les badges d’accès, les téléphones professionnels, ordinateurs ou tablettes, et encore et surtout les véhicules professionnels, dans lesquels sont insérés des balises ou des systèmes de localisation GPS.
Ainsi, la géolocalisation d’un salarié par l’employeur consiste à user d’outils technologiques et professionnels, dans le but de connaître en temps réel la position géographique de l’objet sur lequel la technologie est installée et donc, intrinsèquement, de la personne qui les utilise.
Une géolocalisation autorisée...
Bien qu’aucune interdiction à la géolocalisation des salariés ne soit fixée, cette idée de contrôle se confronte à l’article L 1121-1 du Code du travail qui dispose que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».Ainsi, en équilibre avec cette disposition, la possibilité de recourir à la géolocalisation des salariés est admise, selon la Cour de cassation, seulement lorsque le contrôle des salariés « ne peut pas être fait par un autre moyen, fût-il moins efficace que la géolocalisation ». La mise en œuvre de ce dispositif « n’est pas justifiée lorsque le salarié dispose d’une liberté dans l’organisation de son travail » (Cass. soc., 19/12/2018 n° 17-14.631) ni si l’utilisation de ce dispositif est utilisée par l’employeur à d’autres fins que celles prévues initialement (Cass. soc., 17/12/2014, n° 13-23.645).
Le recours à la géolocalisation des salariés s’avère justifié, notamment dans les circonstances suivantes :
- Pour assurer la sécurité du salarié, des marchandises ou des véhicules ;
- Contrôler le respect des règles d’utilisation du véhicule ;
- Optimiser une activité, notamment en termes de coût.
Toute utilisation d’un système de géolocalisation est interdite :
- Lorsque le salarié n’est pas à la disposition de l’employeur,
- Lorsqu’elle vise à calculer le temps de travail du salarié ;
- Pour contrôler le respect des limitations de vitesse ;
- Ou encore pour surveiller les déplacements des représentants du personnel dans le cadre de leur mandat.
... mais soumise à conditions
L’employeur qui décide d’utiliser un système de géolocalisation est tenu d’informer préalablement par écrit les salariés de cette mesure.Ce prérequis est garanti par l’article L 1222-4 du Code du travail, selon lequel « Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance ».
D’autre part, lorsque ce dispositif est mis en place, les salariés concernés doivent avoir accès aux données les concernant qui ont été enregistrées.
De plus, ce dispositif doit pouvoir être désactivé par le salarié en dehors de ses horaires de travail.
L’employeur doit ensuite impérativement :
- Consulter les représentants du personnel en leur précisant la finalité du recours à la géolocalisation. Par la suite, l’employeur doit les informer de sa décision définitive en précisant quels salariés et quelles données sont concernés par la mesure ;
- Tenir un registre des données collectées par le système de géolocalisation, la façon dont elles sont sécurisées, en plus de prévoir un délai de suppression automatique qui ne peut être supérieur, en principe, à deux mois.
En outre, les données peuvent être conservées cinq ans lorsqu’elles sont utilisées dans le cadre du suivi du temps de travail.
GILLES Avocats