Crédit photo : © Cass. civ 3ème 6 mai 2021 n°20-15.094
Le bailleur ne peut évoquer le bénéfice de la garantie des loyers lorsque le logement ne répond pas aux conditions de décence
Publié le :
02/07/2021
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Parmi les obligations du bailleur figure celle de délivrer au locataire un logement décent, dont les critères sont fixés par décret et englobent notamment le fait de garantir une superficie minimale, l’absence d’animaux nuisibles, la fourniture d’équipement minimum (eau potable, chauffage, évacuation, etc.) en plus de garantir la santé et la sécurité du locataire.
Au titre du non-respect de cette obligation, le locataire est fondé à demander la résiliation du bail, mais est tenu de poursuivre le paiement des loyers, ce qui n’est pas le cas en cas d’arrêté de péril pris sur le logement. À la suite à cet acte administratif du maire de la commune qui met en demeure les responsables de l’immeuble d’effectuer le nécessaire pour protéger les occupants, voire ordonne leur évacuation et la démolition de l’ouvrage, le paiement des loyers cesse d’être dû à compter du premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté.
Qu’advient-il alors du propriétaire qui use de la garantie des loyers impayés pour être indemnisé des loyers non perçus pour la période couvrant l’arrêté de mise en péril ? Dernièrement, une décision a été rendue concernant cette situation.
Un bailleur et un locataire signent un bail d’habitation pour un appartement où un organisme de logement social verse le dépôt de garantie et consent au bailleur une garantie pour le paiement des loyers. Ce type de garantie prévoit qu’en cas de défaut de paiement du locataire, l'organisme s'engage à rembourser au propriétaire les loyers non perçus.
Pendant près d’un an, le locataire ne verse plus ses loyers, le bailleur met alors en œuvre la garantie et l’organisme lui verse une somme de plus de 15 000 euros au titre des loyers impayés.
S’apercevant que deux arrêtés de péril imminent et non imminent portant sur l’immeuble où se situe le logement loué ont été publiés, l’organisme reproche au bailleur de ne pas l’avoir informé de cette situation et l’assigne en nullité du contrat de garantie des loyers pour dol et en restitution des sommes versées. Ces arrêtés font état de risques d’effondrements, et la propriétaire avait été mise en demeure de faire cesser l’état de péril, par la réalisation des travaux nécessaires destinés à garantir la sécurité des occupants de l’immeuble.
Le logement frappé d’un arrêté de péril ne satisfaisait pas aux exigences de décence et selon l’organisme cette situation permet au locataire de refuser de payer les loyers. Le bailleur qui exige de la caution le versement des loyers est alors de mauvaise foi.
Devant la Cour d’appel, la mauvaise foi de la propriétaire est constatée et la nullité de la convention prononcée, obligeant le bailleur à restituer la somme versée au titre de la garantie des loyers impayés.
Saisie à son tour, la Cour de cassation rappelle que « la mauvaise foi dans l’exécution d’une convention n’est pas sanctionnée par la nullité de celle-ci », la Cour d’appel ne pouvait donc pas prononcer la nullité du contrat portant sur la garantie de paiement des loyers.
Toutefois, la Haute juridiction ne remet pas en cause le fait que l’organisme de cautionnement des loyers impayés soit en droit de réclamer le remboursement des sommes versées, alors que le logement ne répondait pas aux conditions de décence.
Reconnaissant le fait que le propriétaire était de mauvaise foi en réclamant le paiement des loyers à la caution, il est précisé que « Le juge peut refuser de faire produire effet à une clause contractuelle mise en œuvre de mauvaise foi ».
L’ensemble du contrat de garantie n’est donc pas nul puisque la mauvaise foi n’est pas une cause d’inexécution, seulement, l’effet d’une clause contractuelle, ici le cautionnement des loyers impayés, peut être écartée du fait de la mauvaise foi de celui qui s’en prévaut.
Le propriétaire est donc condamné à rembourser la somme globale versée au titre des loyers impayés.
LEXGROUP Notaires
Référence de l’arrêt : Cass. civ 3ème 6 mai 2021 n°20-15.094
Historique
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