Violation d'un droit de préférence sur des titres et mise en place de mesures conservatoires
Publié le :
22/05/2023
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Lorsqu’une partie s’estime victime d’une violation de son droit de préférence, elle peut solliciter, selon les cas, la nullité de la vente, la substitution au contrat, l’exécution forcée ou des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.
Cependant, dans l’attente du règlement définitif du litige, il est utile de solliciter, dans un premier temps, des mesures conservatoires afin d’assurer l’efficacité des éventuelles mesures d’exécution qui pourraient être prises. C’est dans ce contexte que l’arrêt du 5 avril 2023 a été rendu concernant l’office du juge des référés saisi d’une demande de mesures conservatoires, afin d’empêcher la violation d’un droit de préférence sur des titres.
Une SELAS s’était affiliée, par contrat daté du 1er septembre 2016, à un réseau animé par une SAS. Le contrat stipulait un droit de préférence, au profit de l’affiliant, en cas de cession des titres de l’affilié. Aussi, une cession de parts de la SELAS, effectuée en violation du droit de préférence, a été annulée par jugement du 19 décembre 2019.
La SELAS et ses associés ont informé la SAS d’un nouveau projet de cession, le 15 mai 2020, avant de se rétracter le 4 décembre 2020, en invoquant la caducité du projet de cession et leur volonté de se prévaloir de leur droit de repentir contractuel.
Le 8 décembre 2020, la SAS a fait signifier à la SELAS sa décision d’exercer son droit de préférence. Invoquant une fraude à l’exercice de ce droit, la SAS a sollicité en référé la mise sous séquestre des titres composant le capital de la défenderesse, du registre des mouvements de titres et des comptes d’actionnaires, ainsi que la désignation d’un administrateur judiciaire afin d’exercer à titre exclusif les droits de vote attachés à ces actions.
Cependant, la Cour d’appel de Besançon a refusé d’ordonner les mesures conservatoires précitées en considérant qu’aucun trouble manifestement illicite n’était établi, afin de justifier lesdites mesures. La demanderesse s’est alors pourvue en cassation, en arguant que les juges du fond ne pouvaient refuser d’accorder des mesures conservatoires, dans le but de conserver un droit de préférence utile, sans caractériser en quoi aucun trouble manifestement illicite n’était établi.
Le 5 avril 2023, la Cour de cassation accueille les prétentions de la demanderesse. En premier lieu, elle rappelle qu’en vertu de l’article 835 du Code de procédure civile le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires, ou de remise en état, qui s’imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
En outre, la Haute juridiction relève que les juges du fond n’ont pas recherché si la SELAS et ses associés n’avaient pas fautivement exercé leur droit de repentir afin de faire échec au droit de préférence de la SAS, et si cette faute ne pouvait pas constituer un trouble manifestement illicite.
En définitive, lorsque le juge des référés est saisi d’une demande de mesures conservatoires tendant à prévenir la violation d’un droit de préférence sur des titres, il est tenu de déterminer s’il y a effectivement eu une tentative de faire échec à l’exercice dudit droit, et dans l’affirmative, s’il en résulte un trouble manifestement illicite.
LEXTON Avocats
Référence de l’arrêt : Cass. com du 5 avril 2023, n°21-25.533.
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